Le républicain Kevin McCarthy affronte lundi son premier test en tant que “speaker” du Congrès américain avec un débat animé sur le règlement de la Chambre des représentants dont il a péniblement arraché la présidence avant le week-end.
Les élus de la chambre basse, qui a basculé de justesse dans l’escarcelle républicaine lors des élections de mi-mandat, se sont réunis en fin d’après-midi pour discuter des règles qui encadreront leur action pendant les deux ans à venir.
Ce débat intervient après une semaine de grande pagaille: une poignée d’élus trumpistes ont bloqué l’accession au perchoir de Kevin McCarthy pendant quatre jours, ce qui n’était pas arrivé depuis plus de 160 ans.
“Ce qui est ressortie de ces discussions, c’est que Washington est cassé”, a commenté son lieutenant Steve Scalise à la reprise des débats lundi, en vantant le projet de règlement, un moyen selon lui d’assurer que la Chambre travaille “à régler les problèmes des Américains”.
Mais ses confrères démocrates ont relevé que Kevin McCarthy avait donné de larges concessions aux frondeurs pour les faire rentrer dans le rang.
“Je suis inquiet des accords conclus dans les coulisses”, a déclaré l’élu Jim McGovern. “Ces règles ne représentent pas une tentative sérieuse de gouverner, mais une demande de rançon adressée à l’Amérique par l’extrême droite”, a-t-il ajouté.
Pendant le week-end, des élus républicains modérés avaient exprimé les mêmes reproches. “Nous n’avons aucune idée des promesses qui ont été faites (…) et cela me fait mal au coeur”, avait notamment déclaré l’élue Nancy Mace, en disant hésiter à soutenir le texte.
“Dette incontrôlable”
Le projet de règlement reflète “nos priorités et nos valeurs”, a assuré lundi l’élu républicain Tom Cole.
Il augmente d’abord la pression sur les élus eux-mêmes qui devront être présents pour voter les textes de loi, contrairement à une mesure adoptée pendant la pandémie, mais aussi sur le “speaker”, puisqu’un seul élu pourra désormais introduire un vote de défiance à son encontre.
Ensuite, “les républicains ont des plans solides pour que l’administration du président Joe Biden rende des comptes”, a expliqué Tom Cole en mentionnant la création d’une commission d’enquête sur “l’instrumentalisation” par les démocrates du ministère de la Justice — une référence aux enquêtes visant l’ex-président Donald Trump.
Enfin, le projet comprend des mesures “pour régler notre procblème de dette incontrôlable”, a ajouté l’élu. Il vise ainsi à inscrire dans les “règles” de la Chambre que chaque nouvelle dépense devra être financée par une coupe ailleurs dans le budget, mais aussi à annuler 72 milliards de dollars alloués aux agents du fisc.
La Maison Blanche a fait savoir que le président Biden opposerait son véto si cette dernière proposition devait être adoptée définitivement, au motif qu’elle causerait 115 milliards de déficit en autorisant “les riches tricheurs à échapper à l’impôt”.
Aides à l’Ukraine
Selon les médias américains, Kevin McCArthy a fait d’autres promesses pour satisfaire les dissidents.
Il aurait notamment accepté de geler le montant du budget pour dix ans et de réduire de 10% les dépenses militaires, au risque de heurter dans son camp.
“Il a été proposé de couper des milliards de dollars dans le budget de la défense, je pense que c’est une idée horrible”, a commenté l’élu républicain Tony Gonzales sur CBS. “Je voterai contre.”
“Avec l’agression russe en Ukraine, la menace chinoise croissante dans le Pacifique (…), comment allons nous pouvoir regarder nos alliés dans les yeux pour leur demander d’augmenter leur budget militaire si l’Amérique diminue le sien?”, a-t-il expliqué.
D’autant que ces coupes pourraient peser sur les aides à Kiev. “Tout est sur la table”, a admis Jim Jordan, un lieutenant fidèle de l’ex-président Donald Trump et rallié à Kevin McCarthy. “Franchement, il faut que l’on regarde l’argent envoyé en Ukraine et qu’on se demande s’il n’y a pas un meilleur moyen de protéger l’Amérique.”
La portée de ces mesures est toutefois largement symbolique: les lois adoptées à la Chambre n’ont aucune chance d’être adoptées au Sénat dont les démocrates gardent le contrôle.
Même si certaines dispositions font dresser les sourcils des modérés, les stratèges du parti républicain espèrent qu’il n’y aura pas plus de quatre défections et que les règles seront adoptées tard lundi.
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